Vue d’ensemble
Jugements de tribunaux de grande Instance
Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 mai 1996
Cour de cassation, Chambre criminelle, 8 avril 2008
Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 mai 1974
Cour de cassation, Chambre criminelle, 3 septembre 1996
Cour de cassation, Chambre criminelle, 9 juin 2009
Depuis les années 1970, la jurisprudence relative à l’appréciation de la responsabilité pénale indirecte des préventeurs et organismes de santé et de sécurité au travail [1] est bien établie : leur responsabilité ne peut être établie sur la base du non-respect des règles du Code du travail qui vise l’employeur ou son préposé qui a reçu délégation de pouvoirs en matière d’hygiène et de sécurité.
Cependant si la responsabilité pénale des préventeurs ne peut être engagée pour non-respect des principes, de la démarche et des règles particulières du Code du travail, elle peut toujours être relevée pour négligence grave, cause, ou l’une des causes, d’un accident ou d’une maladie professionnelle : en tant qu’auteurs indirects potentiels du dommage, la faute qui peut être reprochée aux personnes exerçant une fonction de prévention doit être une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’il ne pouvait ignorer.
Initialement les jugements de Tribunaux de Grande Instance (TGI) de 1971, 1973 et 1976 sont à l’origine de la jurisprudence qui impute à l’employeur, en tant que décideur dans l’entreprise ou la collectivité, la responsabilité pénale en cas de non-respect des principes et des règles de prévention du Code du travail, d’où l’exonération des préventeurs en tant que conseillers à ce titre, mais qui n’exclut pas leur responsabilité pénale au titre du droit commun (code pénal) en cas de défaut de conseil qui serait la ou l’une des causes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ou d’une mise en danger grave.
Relaxe d’un préventeur, agent de sécurité, en matière d’application de la réglementation du travail, sa fonction de conseiller ne lui conférait aucun pouvoir de commandement et rendait impossible toute délégation de pouvoir.
Cass. Crim., 28 mai 1996.
Cassation d’un arrêt de condamnation d’un coordonnateur de chantier qui, de par sa fonction de conseiller, ne peut se voir reprocher par une Cour d’appel le non-respect de la réglementation du Code du travail en l’espèce sur la conformité des appareils élévateurs utilisés :
Cass. Crim., 8 avril 2008.
Mais responsabilité possible d’un préventeur dans la mesure où sa faute personnelle serait la ou une des causes de l’accident ; un Chef de service de sécurité a été reconnu coupable d’homicide involontaire par négligence pour n’avoir pas attiré l’attention des utilisateurs d’un produit dangereux alors même qu’il en connaissait le caractère inflammable.
Cass. Crim., 21 mai 1974.
Responsabilité du directeur d’un bureau d’étude extérieur à l’entreprise qui a fourni des calculs incomplets ayant entraîné l’effondrement d’un talus et la mort de plusieurs ouvriers.
Cass. Crim., 3 septembre 1996.
La jurisprudence sur l’appréciation de la responsabilité des préventeurs est bien établie
Sur le chantier de construction du pont Le Havre – Honfleur, le conducteur d’une centrale à béton dépourvue des dispositifs de protection a été blessé lors de la mise en marche. Or, l’intervention limitée de l’agent de sécurité mis en cause, qui ne disposait d’aucun pouvoir de commandement vis à vis des personnels des entreprises concernées, a été improprement qualifiée de subdélégation. La Cour a donc conclu à la relaxe de l’agent de sécurité, sa fonction de conseiller étant incompatible avec une délégation de pouvoir ; mais la Cour a confirmé la condamnation du directeur de chantier.
Un coordonnateur de chantier avait été condamné par un Tribunal correctionnel confirmé en appel, pour avoir laissé utiliser un ascenseur non conforme lors de travaux préalables à la réception d’appartements, et par là avoir involontairement causé des blessures entraînant une incapacité de travail supérieure à trois mois.
Pour la Cour de cassation, c’est le chef d’entreprise ou l’employeur qui est tenu d’assurer le respect des règles d’hygiène et de sécurité et qui ne peut s’exonérer de sa responsabilité en cas d’infraction, qu’en démontrant qu’il a délégué ses pouvoirs à un préposé désigné par lui et doté de la compétence, de l’autorité ainsi que des moyens nécessaires pour veiller efficacement à l’observation des dispositions en vigueur.
Qu’en retenant en l’espèce l’existence d’une telle délégation consentie à Claude X. aux seuls motifs qu’en sa qualité de coordonateur de travaux il était chargé de la levée des réserves formulées lors des réunions de chantier et qu’il avait donné les consignes de nettoyage, … la Cour n’a pas établi que Claude X... ait été investi de la mission d’assurer le respect des règles de sécurité sur le chantier de la résidence « les papillons » pas plus qu’il n’ait été doté de l’autorité et des moyens nécessaires ni qu’il ait eu la compétence adéquate.
D’où la cassation de l’arrêt qui avait condamné à tort le coordonnateur de chantier.
« Attendu que pour déclarer L… coupable d’homicide involontaire, la Cour d’appel constate que ce chef du service de sécurité n’avait pas fait attirer l’attention des utilisateurs du produit Espol M sur le danger d’inflammation, malgré l’information transmise par la Caisse de Sécurité sociale, et n’avait établi aucune consigne sur ce point particulier … »
D’où, par ces motifs, la Cour de Cassation a rejeté le pourvoi du chef du service de sécurité de l’entreprise et a confirmé sa condamnation.
A la suite de calculs incomplets et irréalistes fournis par un bureau d’études extérieur à l’entreprise, un talus s’est effondré provoquant la mort de plusieurs personnes travaillant sur le chantier.
Condamné pour homicide involontaire, le directeur du bureau d’études invoquait pour sa défense le refus de l’entreprise de verser le complément d’honoraires correspondant aux calculs supplémentaires nécessaires, moyen non retenu par les Juges.
En effet, devant l’attitude de cette entreprise, le bureau d’études aurait dû se retirer du marché alors qu’au contraire il a laissé se poursuivre les travaux sans que soient réalisés les calculs qu’il savait nécessaires pour la sécurité de l’ouvrage.
Responsabilité d’un coordonnateur de chantier pour ne pas avoir fait interdire l’accès au chantier de rénovation d’un gymnase municipal resté ouvert au public : sa mission définie par l’article R. 4532-11 du code du travail consistait à assurer la sécurité des salariés intervenant sur le chantier mais aussi celle des personnes étrangères à celui-ci, comme c’était le cas en l’espèce ; faute qui avait causé la mort d’un jeune sportif provoqué par la chute d’un panneau d’information descellé pour les besoins du chantier.
[1] Conseillers en prévention, animateurs de sécurité, chefs de service de sécurité ou de prévention des risques professionnels, techniciens et ingénieurs de sécurité, consultants et experts, bureaux d’étude et de contrôle, médecins du travail ou médecins de prévention et infirmiers(ères) du travail, intervenants en prévention des risques professionnels, coordonnateurs de chantiers, conseiller en transport de matières dangereuses …